⚡️ De quoi parle-t-on ?
- Le site internet de Forbes, le célèbre magazine économique, est au centre d'une polémique sur une opération sophistiquée de marketing d'affiliation couplée à du parasite SEO.
- La production à grande échelle de contenu “content commerce” par une société tierce met en cause la pérennité de ce business model.
- Ce scandale a suscité de vives réactions dans le secteur, il met en lumière des pratiques qui posent des questions fondamentales sur la transparence et l'intégrité des grands médias généralistes.
- Tout est parti de cet article de blog dénonçant la pratique.
- Voici les détails de ce qui s’est passé, ses impacts sur les éditeurs, et les conséquences plus larges sur le paysage des médias généralistes qui utilisent l'affiliation comme source de monétisation.
🔍 Pourquoi c'est important ?
- Forbes Marketplace, une entité séparée de Forbes, a exploité la notoriété et l'autorité du magazine pour créer et promouvoir du contenu shopping basé sur l'affiliation.
- Cette activité génère des revenus annuels impressionnants. La projection pour 2027 est de 400 millions de dollars en 2027. Forbes détient 40% de Forbes Marketplace (source). Certaines sources mentionnent que Forbes Marketplace ambitionne même d'acquérir Forbes lui-même.
La plupart des médias généralistes suivent la même tendance, en France également.
🔑 Les infos clés de l'opération
- Exploiter l'autorité du domaine de Forbes pour produire des articles via une société tierce, et bien se positionner sur Google pour attirer un large public.
- Forbes "prête" donc son nom et son autorité à une société spécialisée dans la production de contenu shopping.
- Publier des articles pensés pour l'affiliation, souvent sous forme de critiques, de tests et d'avis de produits, souvent sans même avoir testé les produits en question.
- Produire ces contenus uniquement dans un but commercial et cibler des requêtes à fort potentiel de monétisation via l'affiliation (exemple : "meilleure assurance vie" ou "meilleur matelas").
- Créer et multiplier des contenus sous différentes sous-marques comme Forbes Advisor, Forbes Home Improvement, Forbes Health, Forbes Vetted... Chacune ciblant un domaine particulier pour maximiser l'impact.
- Générer plus de 100000 dollars par mois en publicité par article bien positionné, en utilisant des pratiques d'optimisation pour s'assurer que ces articles se classent en tête des recherches sur Google.
💥 Impact sur l'industrie des éditeurs
Ce mode de fonctionnement a des conséquences importantes pour les éditeurs, notamment les médias généralistes qui suivent la même voie que Forbes, à savoir profiter de l'autorité du nom de domaine pour se positionner sur des requêtes très rentables pour lesquelles ils ne sont pourtant pas les mieux placés pour y répondre.
Les conséquences immédiates et à long terme :
- Érosion de la confiance des internautes, les frontières entre contenu éditorial et marketing sont devenues floues. Les lecteurs ont de plus en plus de mal à distinguer ce qui est de l'information objective de ce qui est de la publicité “déguisée”.
- Difficultés accrues en SEO, face à des contenus affiliés présentés comme des sources autoritatives par des entités qui abusent de leur notoriété. Cela rend la concurrence pour les classements encore plus féroce pour les éditeurs traditionnels.
- Pression sur les modèles de revenus existants, forçant certains éditeurs à envisager des pratiques similaires, risquant ainsi d'affecter leur intégrité éditoriale et de diluer la qualité du contenu.
- Risque de contrôles réglementaires renforcés sur le marketing d'affiliation et la nécessité de respecter des normes plus strictes pour garantir la transparence vis-à-vis des consommateurs.
🔧 Réponse de Google et conséquences à venir
Face à ces pratiques, et depuis la publication de l'article qui a révélé l'opération, Google a commencé à réagir :
- Ajustements des classements qui ont déjà affecté la visibilité de Forbes Advisor dans les résultats de recherche, entraînant une baisse de trafic significative pour ces contenus affiliés.
- Possibilité d'un renforcement des politiques sur la qualité du contenu et les pratiques d'affiliation, obligeant les éditeurs à être plus clairs sur la nature de leurs articles.
- Potentielles mises à jour d'algorithme visant à différencier plus efficacement le contenu véritablement éditorial du contenu affilié, et à pénaliser les sites qui trompent les utilisateurs sur la nature et la production de leur contenu.
🔬 Comment s'adapter : stratégies pour les éditeurs
Les médias généralistes qui utilisent l'affiliation et le content commerce pour diversifier leurs revenus doivent s'adapter et ne pas attendre la même sanction que Forbes.
- Privilégier la transparence en divulguant clairement les contenus d’affiliation et les contenus sponsorisés, afin de ne pas induire le lecteur en erreur et de renforcer la confiance.
- Publier du contenu original de qualité, en interne, qui apporte une vraie valeur aux lecteurs, des analyses approfondies, et des perspectives uniques que les contenus d'affiliation produits par des entités tierces ne peuvent offrir.
- Diversifier les sources de trafic en créant des liens directs avec les lecteurs par le biais de newsletters, d'applications mobiles, et de communautés en ligne, réduisant ainsi la dépendance vis-à-vis des moteurs de recherche.
- Développer des stratégies éthiques de marketing d'affiliation, où la transparence est mise en avant et où les recommandations sont justifiées par un réel intérêt pour le lecteur.
- Mettre en place des pratiques SEO durables qui se concentrent sur l'expérience utilisateur, la pertinence du contenu, et l'engagement, plutôt que de simplement viser le classement à tout prix.
- Capter l’attention de l’internaute en lui proposant des contenus exclusifs et lui proposer de rejoindre une newsletter ou une communauté.
Notez que toutes ces stratégies sont également valides pour les personnes qui souhaitent lancer un side business en 2025.
🚪 Protéger sa réputation : mesures clés
Pour éviter ces dérives et se prémunir contre une perte de crédibilité, les éditeurs peuvent :
- Renforcer leur identité de marque avec des marques déposées, un branding cohérent et une ligne éditoriale clairement définie, pour se démarquer des acteurs douteux.
- Améliorer la qualité du contenu et la transparence avec des politiques claires de divulgation des partenariats, afin de préserver l'intégrité éditoriale.
- Surveiller en permanence leurs contenus et développer des plans de gestion de crise, pour réagir rapidement en cas de controverses ou de fausses informations diffusées à leur sujet.
- Se spécialiser sur des thématiques qui sont directement liées à leur lectorat et leur audience au lieu de vouloir couvrir tous les sujets, sans forcément l'expertise nécessaire.
- Renforcer la confiance des lecteurs par une communication transparente, un engagement authentique, et la création d'une véritable communauté autour de la marque.
- Internaliser la production éditoriale au lieu de passer par des sociétés tierces qui produisent du contenu affiliation de manière industrielle, sans prendre en compte les spécificités et l’audience du média.
🤖 L'avenir de l'édition content commerce
Le cas de Forbes est une leçon importante pour l'industrie de l'édition qui utilise l'affiliation comme source de monétisation.
- Il montre l'équilibre fragile entre génération de revenus et intégrité éditoriale, un équilibre qui peut facilement basculer au détriment de la qualité et de la confiance du public.
- Pour prospérer dans cet environnement en constante évolution, les éditeurs doivent miser sur la transparence, la qualité, et l'éthique.
- Ils doivent également trouver des moyens de s'adapter aux nouvelles réalités numériques sans compromettre leur mission première : informer et éduquer leurs lecteurs.
- Seule une approche axée sur la confiance, l'authenticité, et l'innovation permettra aux éditeurs de maintenir leur pertinence et de s'assurer une pérennité dans un secteur de plus en plus concurrentiel.
Contribution
- Merci à Michaël Maarek pour l'aide à la création de ce rapport.